Blog de chroniques de lectures variées et diverses :
Littérature - Polars/Thrillers - SFFF - Romances - BD....

mardi 29 décembre 2020

Sigurd

 




Auteur : Federico Saggio

Editions : Auto-édition



Sigurd, dernier représentant d'une lignée issue de l'union d'Odin, roi des Ases, et d'une mortelle, est confié à la mort de ses parents à Mîme, le plus grand Artisan-Forgeron des Nibelungen. Ce dernier est censé l'éduquer dans l’espoir qu’il puisse un jour accomplir la tâche qui lui est échue : tuer le dragon Fafnir, reprendre le trésor maudit au nom des Ases et enfin le protéger de sa vie.
Quant à Sigurd, ce sont d’autres ambitions, d’autres rêves qui l’animent. Le Feu d’Odin coule dans ses veines, il veut vivre ! Quel dommage que les Dieux ne l’entendent pas de cette oreille… car il n’est pas de plaisir plus savoureux pour les Ases, que d’assister à la déchéance d’un mortel qui se débat avec les affres de la destinée.
Ce roman est l’aboutissement de près de deux ans de recherches menées par Federico Saggio à recouper les sources, faire des choix judicieux et pertinents pour conserver la cohérence du scénario et la substance des personnages en dépit des contradictions inhérentes à la nature d’un mythe de tradition orale aux itérations multiples... sans jamais en trahir l’essence.
Publié le 9 juin 2020



Mon avis

En tout premier lieu je tiens à remercier l'auteur pour sa confiance et surtout sa grande patience ... ainsi que ma copine Les sortilèges des mots qui m'a donné envie de lire ce roman avec son retour enthousiaste.

Quel étrange livre qui plonge le lecteur directement au cœur de la mythologie nordique, étrange car très déstabilisant et très prenant à la fois. Un univers plein de noirceur, de violence porté par une plume élégante, travaillée dont chaque mot est pesé. 

Sigurd est un jeune homme qui a été élevé loin de toute civilisation par le nain Mime grand artisan forgeron. Son seul ami est un loup avec qui il passe le temps à chasser.
Chargé d'une mission par les Dieux, il part sur les routes pour combattre le dragon Fafnir mais aussi découvrir les secrets de son passé. Sa route est jalonnée de rencontres successives qui se terminent quasiment toutes dans un bain de sang car Sigurd est d'un tempérament particulièrement emporté. 

Quel singulier personnage ! Il est fait d'une pièce, suivant son instinct, réagissant avec violence et peu porté à la réflexion dans un premier temps. C'est peut être un parti pris de l'auteur de l'avoir ainsi désincarné lui donnant par là même un statut de personnage mythique qui se caractérise avant tout par les épreuves qu'il affronte, chacune d'elles, le faisant évoluer, grandir, lui donnant de l'épaisseur et l'envie de se battre contre un destin qu'il refuse, l'humanisant peu à peu. 

Les variations typographiques et textuelles, la narration à la première personne ainsi que le refrain "Sigurd fils de Sieglinde , fils de Sigmund" donnent une vraie dimension orale au récit ainsi qu'une proximité avec le lecteur. On se laisse porter par les mots, les descriptions, les vers....

Pour finir, la mythologie nordique très présente : Odin, les Ases, l'anneau du Nibelung, le dragon Fafnir, Brunehilde la Walkyrie, le crépuscule des dieux, font échos aux grands opéras de Wagner et il m'a clairement manqué une connaissance plus fine de ces légendes (certaines m'étaient même totalement inconnues) pour pouvoir apprécier pleinement toutes les allusions et détails du roman. 
J'ai refermé mon livre avec l'impression d'être passée à côté de certaines choses,  l'envie d'en savoir plus sur cette mythologie et de relire ce roman par la suite.

 
Mon appréciation : 📚📚📚


lundi 28 décembre 2020

Les ours mal léchés s'apprivoisent à Noël

 







Auteur : Valentine Stergann
Editions : Hugo poche




Et s'il suffisait de quelques flocons de neige pour réparer les cœurs ?
Malgré un quotidien bien huilé, Irène a l'impression de passer à côté de son destin. Alors, quand elle apprend que la vieille amie de sa grand-mère lui lègue sa maison en Angleterre, elle n'hésite pas et saute seule dans le premier avion, direction Charlestown.
À l'aube des fêtes de fin d'année, elle démarre une nouvelle vie avec de nouveaux voisins : un septuagénaire loufoque, une pétillante serveuse... mais surtout Rudolph, solitaire et bourru, veuf depuis deux ans. Aussi attirant qu'agaçant, cet homme des cavernes se maintient tant bien que mal au-dessus des flots grâce à son fils.
Et si l'étincelante Irène réussissait à le faire sourire à nouveau ? Et si c'était ça, la magie de Noël ?
Paru le 8 octobre 2020

Mon avis :

Chaque année, j'aime lire quelques romances de Noël, un peu comme une tradition pour m'immerger dans l'atmosphère festive et pleine de bons sentiments.... mais cette fois-ci je n'ai pas pu aller au delà de ce roman...

Je vais faire court, je me suis terriblement ennuyée entre une histoire trop attendue et des personnages trop superficiels et caricaturaux....
Honnêtement, je pense qu'il y a quelques temps j'y aurais certainement trouvé mon compte,  mais ce n'est plus le cas aujourd'hui et je pense que l'an prochain je ne tenterai même pas (sauf peut-être pour le Sarah Morgan).

Une page qui se tourne dans ma vie de lectrice ... 


Mon appréciation : 📚📚

mercredi 9 décembre 2020

La Rouelle - tome 2 : Dans l'ombre des Bastions


 





Auteur : Muriel Rawolle
Editions : Auto-édition






Depuis leur entrée dans la forteresse, Jeck, Corl, Bulle et Ninoune vont de déconvenue en déconvenue. D’abord ravie d’exercer son métier d’herboriste, Bulle découvre que travailler pour l’Apothicaire du Patriarche présente bien des inconvénients. Courtisés par une armée de sorciers désireux de transmettre leur savoir, Corl et Ninoune se questionnent. On leur dit que leur avenir dépendra de leur choix, mais qu’en est-il réellement ? Et Jeck, profondément déçu par la rencontre avec son géniteur, n’a qu’une envie : rentrer en Nurmie. Son arrivée en même temps que les futurs apprentis compromet sa mission. Que décideront-ils ?Dans l’Ombre des Bastions, les choix sont stratégiques…
Paru le 20 octobre 2020

Mon avis :

Un second tome tout à fait à la hauteur de mes attentes.... ♥
Mais comment parvenir à exprimer à quel point j'aime cette histoire, un tel engouement pour les personnages, un tel intérêt pour leur devenir ?

L'histoire reprend juste à la fin du tome 1 dans une belle continuité.
Tous nos jeunes voyageurs sont désormais arrivés à la Rouelle. C'est la découverte de la cité, de ses habitants, de ses façons de vivre.

Bulle (ma préférée)  devient l'apprentie de Julius dans son travail d'Apothicaire du Patriarche. La tâche est rude, le bonhomme n'est pas tendre... mais quelle personnalité charismatique ! Son travail la passionne et lui ouvre bien des portes, il a beaucoup à faire. Fidèle à elle-même, elle met du cœur à l'ouvrage et ne compte pas sa peine,  
Jeck a mené à bien sa mission et délivré le message de sa mère mais il reste coincé sur place à attendre une réponse qui tarde, l'émoi de l'arrivée des jeunes sorciers prenant toute l'attention de la cité. De plus, ses sentiments intimes sont mis à mal devant la découverte d'un père qu'il ne peut admirer...
Corl et Nine quant à eux sont face à un choix crucial, choisir celui ou celle qui sera leur professeur.  Les sorciers sont prêts à tout pour remporter la mise, calculs et manigances vont bon train. Devant l'empressement de chacun à les flatter, les entourer, les gâter, il est difficile de garder la tête froide et de jauger qui correspond le mieux à ses attentes.... La vaniteuse Nine et le doux Corl n'ont que peu de temps pour se décider. Ce choix capital, c'est tout l'enjeu du livre !

Hégésippe garde un rôle central tout en ne faisant rien si ce n'est boire... son chat Canaille, toujours aussi énigmatique, déambule sans fin entre le laboratoire et sa chambre, créant un lien constant entre lui et l'herboristerie et donnant lieu à quelques scènes savoureuses.
La prophétie reste un fil rouge rappelant le danger qui plane, et ne sera dévoilée vraiment qu'en toute fin.

Un tome captivant où chacun  prend ses marques à l'ombre des Bastions. Installation, découvertes, rencontres multiples..... on ne s'ennuie jamais jusqu'au coup de théâtre final, tellement parfait, j'aime les choix faits par l'auteur, c'est exactement ce que j'avais envie de lire.

L'écriture est toujours aussi alerte, prenante, parfaitement dosée entre actions et péripéties, descriptions de l'univers ou de l'environnement, dialogues vivants, psychologie des personnages qui continuent d'évoluer au fil des pages, une plume travaillée  tout en restant accessible.  

J'ai adoré ce roman, une de mes meilleures lectures de l'année 2020. Je ne comprends pas comment c'est possible de ne pas en entendre plus parler !  Parfois, il y a de véritables pépites dans l'auto-édition et cette série en est une assurément !
Vivement la suite ! 


Un grand merci à Muriel Rawolle pour sa gentillesse et 
pour les belles heures d'évasion offertes ! 



Mon appréciation : 📚📚📚📚






mercredi 18 novembre 2020

Le professeur

 







Auteur : Charlotte Brontë
Editions : L'Archipel




Orphelin depuis l'enfance, William Crimsworth étudie dans la prestigieuse école d'Eton, grâce à l'aide financière de sa famille. À la fin de ses études, il rejoint son frère aîné Edward, qui mène carrière dans l'industrie. Mais les deux frères ne s'entendent pas : victime du caractère irascible d'Edward, William choisit de s'exiler en Belgique. Une nouvelle vie s'offre à lui dans un pensionnat pour garçons à Bruxelles, où il devient professeur d'anglais. Intègre et pragmatique, William est vite remarqué. On lui propose d'enseigner également dans le " pensionnat pour demoiselles ". Sous le charme de sa directrice, Mlle Reuter, il lui ouvre son cœur... et apprend qu'elle est sur le point de se marier. Mais lorsqu'il s'éprend par la suite de Frances Henri, la professeure de couture, c'est Mlle Reuter qui en prend ombrage. Et un matin, sans prévenir, William apprend que Mrs Henri a changé d'établissement...
Paru le 4 février 2015

Mon avis :

De Charlotte Brontë, je ne connaissais que Jane Eyre, un de mes livres préférés que j'ai lu et relu tant de fois... J'avais très envie de découvrir ses autres œuvres et pour se faire autant commencé par le premier publié.

En désaccord avec ses tantes et oncles, le narrateur William Crimsworth, un jeune aristocrate désargenté orphelin, n'a d'autre solution que de demander l'aide de son frère à la fin de ses études à Eton. Ce dernier, distant et froid lui concède un emploi industriel  mais guère plus... Leurs relations difficiles s'enveniment au fil du temps et c'est sur les conseils de l'étrange Hunsden que William donne sa démission et part s'installer en Belgique avec une lettre de recommandation en poche.

Les débuts sont difficiles mais il finit par être embauché en tant que professeur d'anglais dans une école de garçons. Sa rigueur et son sérieux vont lui permettre d'enseigner également dans le pensionnat de jeunes filles adjacent.
Le personnage est assez obtu malgré des qualités certaines, ses opinions sont tranchées et ses réflexions 
à l'emporte-pièce sur les Belges, les Français, sur les femmes, sur les protestants et les catholiques...etc...  le rendent antipathique au lecteur du XXIe siècle.
Pourtant j'ai suivi sans déplaisir tous ses déboires professionnels et sentimentaux, la plume de Charlotte Brontë se reconnaît et se savoure. J'aime beaucoup sa façon de décrire les personnages et leurs sentiments et l'on perçoit ses propres expériences d'enseignement à travers l'histoire de William.

Sans être au même niveau que le superbe "Jane Eyre", ce roman est une agréable lecture et je poursuivrai ma découverte des œuvres de l'auteur avec grand plaisir, "Shirley" et "Vilette" m'attendent sur mes étagères !

Mon appréciation : 📚📚📚

vendredi 13 novembre 2020

Jamais tu ne me quitteras

 






Auteur : Chevy Stevens
Editions : L'Archipel








Lindsey a refait sa vie sur une île proche de Vancouver. Voilà dix ans, la jeune femme avait pris la décision de fuir avec sa fillette un mari qui, sous une apparence d'homme idéal, lui faisait vivre l'enfer.
Aujourd'hui, Lindsey a la sensation d'être suivie et espionnée jusque chez elle – comme autrefois. Pour elle, ça ne fait aucun doute : Andrew, son ex-mari – sorti depuis peu de prison – veut se venger.
Andrew, lui, prétend qu'il a changé. Sincère repentance ou manipulation machiavélique ?
L'enfer recommence ! Et ses flammes vont tout dévaster...
Paru le 8 octobre 2020

Mon avis

Merci à Babelio et aux Editions de l'Archipel pour l'envoi de ce roman.
Cela faisait très longtemps que j'entendais parler de Chevy Stevens et cette masse critique a été l'occasion d'enfin découvrir l'auteur...

2016 dans la région de Vancouver,  Lindsey a reconstruit sa vie avec sa fille Sophie. Elle est à a tête d'une petite entreprise de nettoyage, participe à un groupe de soutien contre les violences domestiques et prend des cours de self-défense... parce que Lindsey a fui un mari violent quelques année auparavant. Celui-ci vient de sortir de prison et la jeune femme constate des phénomènes étranges autour d'elle, elle se sent surveillée, elle est persuadée que quelqu'un s'est introduit chez elle, des objets changent de place... Qui cela peut-il être sinon cet homme qui lui a fait vivre l'enfer ?
 .
L'angoisse s'installe et les souvenirs affleurent. En alternant le présent et les premières années de sa vie de couple, Lindsey raconte à la première personne, la rencontre, le bonheur, et peu à peu l'emprise, la violence, la peur et la solitude... Une première partie particulièrement bien construite qui décrit avec beaucoup de réalisme de quelle façon insidieuse les rapports entre eux se sont dégradés, l'alcool, la jalousie, la maltraitance psychologique, puis physique, l'impossibilité de parler à ses proches d'une vérité qu'elle est la seule à vivre... Lorsqu'elle se décide enfin à le quitter, elle est prête à tout pour lui échapper...
A cela s'ajoute le point de vue essentiel de Sophie qui n'a pas du tout le même ressenti que sa mère et qui a soif de connaître un père qui lui manque depuis longtemps. 

Dans une seconde partie, Lindsey se bat pour tenir à distance Andrew. Elle fait appel à la police et l'inspecteur Parker tente de l'aider au mieux. Mais l'homme est particulièrement intelligent.... 
Le suspense grandit, s'épaissit, l'auteur sème des indices, trouble le lecteur, change les perspectives... Entre l'effroi de la mère et les attentes de la fille, Andrew semble mener le jeu. 

Une très bonne lecture difficile à lâcher avec des personnages denses et attachants, une thématique abordée avec intelligence et sensibilité, une intrigue parfaitement maitrisée entre suspense et rebondissements jusqu'au dénouement vraiment réussi.  il me faut un autre roman de l'auteur !

Mon appréciation : 📚📚📚📚


mercredi 11 novembre 2020

Les Dynamiteurs

 






Auteur : Benjamin Whitmer
Editions : Gallmeister





1895. Le vice règne en maître à Denver, minée par la pauvreté et la violence. Sam et Cora, deux jeunes orphelins, s'occupent d'une bande d'enfants abandonnés et défendent farouchement leur “foyer” – une usine désaffectée – face aux clochards des alentours. Lors d'une de leurs attaques, un colosse défiguré apporte une aide inespérée aux enfants, au prix de graves blessures que Cora soigne de son mieux. Muet, l'homme-monstre ne communique que par des mots griffonnés sur un carnet. Sam, le seul qui sache lire, se rapproche de lui et se trouve ainsi embarqué dans le monde licencieux des bas-fonds. Expéditions punitives, lynchages et explosions précipitent l'adolescent dans l'univers honni des adultes, qui le fascine et le repousse à la fois. Au point de modifier sa nature profonde, et de l'éloigner insidieusement de Cora. Les Dynamiteurs est empli d'une tendresse inconditionnelle envers les laissés-pour-compte. Ce roman intense raconte la fin brutale de l'enfance dynamitée par la corruption du monde des adultes.
Paru le 3 septembre 2020

Mon avis :
Denver 1895, la vie est particulièrement difficile pour le jeune Sam. Orphelin, il tente de survivre dans une usine désaffectée avec Cora et d'autres enfants plus jeunes. Il faut se battre jour après jour pour garder son territoire, pour manger.... et se méfier de tous les Crânes de Nœud (les adultes) quels qu'ils soient, même le charismatique pasteur Tom qui œuvre pour leur venir en aide. 

Lorsque Goodnight, un géant muet à la gueule cassée parvient jusqu'à eux, blessé, Cora s'occupe de lui mais il n'apportera pas la sécurité escomptée, au contraire c'est le loup qui est entré dans la bergerie...
Sam se retrouve lié à lui, embauché par Cole son ami pour lire et transmettre les petits mots que Goodnight griffonne sur un carnet, sa seule façon de communiquer et il va les suivre partout, dans les bas-fonds, bars, bordels, tripots... Il devient le témoin direct d'une guerre de gangs qui dégénère, violente, sanglante, spectateur de nombreuses rixes, règlements de compte et exécutions.. Il abandonne jour après jour un peu plus de sa candeur et de son innocence, pris au piège des événements qui se succèdent irrémédiablement, alternant entre rejet et fascination de ce monde brutal. C'est un véritable engrenage et il n'y a pas de retour en arrière possible.

Benjamin Whitmer sait construire à merveille ses personnages. Sa galerie de portraits d'enfants est saisissante : Hope, Jimmy, Watson, Hiram, Lottie, Commodore, Ulysses, Fawn, Offie, Jefferson, Rena, tous ont une histoire, une particularité. Leur destin semble tout tracé malgré le dévouement de Cora pour les rassembler, les défendre.....Quel joli personnage que cette dernière ! Lumineuse, perspicace, dotée d'une faculté illimitée à accueillir, soigner, protéger. elle est le point d'ancrage vers lequel Sam revient toujours. Entre eux, le lien affectif/amoureux est très fort, les mots ne sont même pas nécessaires, il y a des silences étourdissants, des regards pénétrants, une connivence évidente...  Mais peu à peu le fossé se creuse, Sam bascule dans un monde qu'elle ne peut pas intégrer.

Comment ne pas s'arrêter sue la plume de l'auteur, c'est pour moi l'atout majeur du roman. Le contraste entre la noirceur du monde environnant et la narration à la première personne pleine de poésie d'un enfant qui reçoit la violence crue est remarquable.  Il raconte son histoire, son amour pour Cora, les morts des hommes, des femmes et des plus petits sans pathos aucun, mais les images employées, la simplicité toute nue donnent une force d'évocation parfois particulièrement émouvante.

Toute cette histoire s'ancre dans une réalité historique et géographique : description d'un Denver gangréné par le vice, celui des laissés-pour-compte du rêve américain, de la misère crasse, évocation de la lutte des ouvriers, dialogues réalistes. 
Le regard est pessimiste  et même résigné mais la relation complexe entre Sam et Goodnight, la solidarité entre les rejetés de la société  et surtout l'amour entre Sam et Cora illuminent le roman, lui rendent sa part d'humanité ! Magnifique ! 

Un grand merci au  Picabo River Book Club. et à Léa  sans oublier Myriam 
ainsi qu'aux Editions Gallmeister pour cette très belle lecture ! 

Mon appréciation : 📚📚📚📚

lundi 9 novembre 2020

Pertinax





Auteur : L. Azarii
Editions : Auto-édition


Maryland, 1715. Une jeune fille de la colonie, Melody Walker, est accusée de sorcellerie et d'hérésie. Thomas Dutourd est payé par plusieurs confessions pour la défendre pendant ce qui s'avère être un simulacre de procès : à Baltimore, où la cohabitation entre catholiques et protestants est de plus en plus compliquée, ce procès contre une quaker est la goutte de trop pour les minorités religieuses qui craignent les retentissements de cette affaire sur leur vie quotidienne. Thomas doit réussir à nager dans ces eaux troubles, entre intérêts personnels et mensonges coupables, pour trouver des alliés et assurer la survie de sa cliente... peu importe son prix.
Paru le 7 juillet 2020

Mon avis :

Je tiens tout d'abord à remercier l'auteur pour l'envoi de son roman, un roman fort intéressant qui m'a fait découvrir des aspects de l'histoire américaine.

Baltimore dans le Maryland 1715, le procès de Melody Walker s'ouvre. Accusée de sorcellerie et d'hérésie, cette jeune Quaker est défendue par Thomas Dutourd, un français de Louisiane. Ce procès s'avère très particulier puisque ce sont le Révérend Hartwood, l'abbé McCoy et le clerc Richard Drew qui ont engagé l'avocat. Protestant, Catholique et Quaker unis dans un même but a de quoi questionner.
Le procès de Salem et l'exécution de Mary Dyer restent vivaces pour tous et chaque confession craint les retombées possibles. Mais est-il possible de sauver Melody Walker ?

En prenant pour point de départ cette parution au tribunal, l'auteur nous plonge dans la complexité des rapports entre les différentes religions qui tentent de s'étendre dans les différents états américains. Les conflits entre Puritains et Catholiques se multiplient. Je ne connaissais pas du tout les Quakers (ou Amis) et c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai découvert les aspects très libres et très modernes de ce courant de pensée. A ce propos, le prologue est particulièrement bienvenu, il donne les grandes lignes d'un contexte historique complexe.

Le procès est mouvementé, entre joutes oratoires, témoignages accablants pleins de superstitions, point de vue scientifique, intérêts de chacun, Thomas n'est pas sans se laisser mener par d'obscures volontés.... Le mystérieux Phoebus/Appolon tire les ficelles dans l'ombre... Dissimulation, perfidie, racisme, un brin de magie, tout concourt à rendre ce procès difficile et à entretenir le suspense.

La construction du roman est très intéressante, il y a des passages de narration mais aussi beaucoup de retranscriptions des heures du procès : discours, interrogatoires, plaidoyers... Cela rend la lecture vivante. Il faut aussi saluer le travail d'écriture de l'auteur, celle-ci colle parfaitement à l'époque choisie, tant par les tournures de phrases que par le vocabulaire, sans pour autant devenir indigeste.

Par delà le procès, émerge le personnage de Melody, lumineuse, moderne qui s'est confrontée à l'obscurantisme de son temps. Ses propres introspections, le récit des témoins, les impressions et découvertes de Thomas dessinent une figure féminine forte et attachante.

Mon gros bémol sera pour la fin que j'ai trouvée un peu trop mouvementée à mon goût et qui garde certains secrets qu'on aurait aimer comprendre. Mais peut-être qu'une "suite" est prévue. Ceci dit, je garde le sentiment d'une bonne lecture, intéressante à bien des égards.

Mon appréciation : 📚📚📚


dimanche 1 novembre 2020

La flèche du Scythe






Auteur : Sébastien Morgan
Editions : Auto-édité






IIIe siècle après JC, l'Empire Romain est assiégé de toute part. Chaque jour, les peuples barbares resserrent un peu plus leur étau. Des rumeurs font état d'une alliance possible entre les peuples goths autour du descendant d'Arminius, célèbre vainqueur des légions lors de la bataille de Teutobourg. Yares, un auxiliaire scythe est envoyé pour trouver et assassiner ce nouveau roi barbare. L'éclaireur pénètre dans la grande forêt alors que des forces surnaturelles s'éveillent...Fortement enraciné dans l'Histoire et les mentalités de l'époque, la Flèche du Scythe est un roman d'aventure plein de fantastique et de sorcellerie. Il plaira tant aux amateurs de l'Empire Romain qu'aux inconditionnels des sagas fantasy.
Paru le 12 novembre 2016

Mon avis

Lorsque j'ai postulé sur Simplement pro pour ce roman, j'avais été attirée par la promesse d'un mélange de récit historique et fantastique mais je ne m'attendais pas à aimer autant ! Une lecture captivante, à la fois ancrée dans une époque précise mais pleine de magie, de légendes et d'aventures.

Au moment où Yares, auxiliaire scythe, élimine d'une seule flèche le jeune garçon destiné à unir les clans goths contre l'Empire Romain qu'il défend, il ne soupçonne pas les conséquences directes qui impacteront sa vie. La sorcière Alara, la mère du défunt n'aura de cesse de se venger et fera appel dans cette entreprise aux forces obscures....
Dès lors, Yares, sa femme et son fils à naitre seront constamment en danger.

Le roman, extrêmement rythmé va nous plonger dans le quotidien d'un soldat de l'armée romaine, loin de sa famille, uni à ses frères d'armes dans un souci constant de défendre l'Empire. Son origine scythe reste un handicap pour la reconnaissance de sa bravoure et sa valeur mais sa loyauté reste intacte. C'est un personnage charismatique qui suscite admiration et jalousie...
Autour de lui gravitent plusieurs personnages clés : son bras droit Lipoxaïs,  son fils Mercurius, le puissant Gaius Tarquini, le centurion Decarius, Faustus Tarquini, le mystérieux Lailoken.... etc... Tous jouent un rôle important dans la succession des événements qui entraînent Yares vers une confrontation inévitable....
Outre l'intrigue principale, le sort de Mercurius, son jeune fils prend une densité particulière. Ses amours impossibles déchainent la colère d'un puissant patricien qui a tout pouvoir pour le persécuter....

Faits d'armes, batailles, manigances personnelles, enjeux politiques, vengeance, trahison, l'auteur ménage moults rebondissements, renouvelant constamment l'intérêt en ajoutant magie, légendes, personnages fabuleux - le passage avec les griffons est juste passionnant. Le mélange entre précision historique (chapitres appelées chants, citations en exergue, souci du détail)  et éléments fantastiques est parfaitement maitrisé et donne tout son sel au récit. 

Un récit d'hommes avant tout, Alara reste le personnage féminin prépondérant et pourtant l'un des passages les plus marquants à mon sens met en lumière la grandeur d'âme et l'abnégation de la femme de Gauis Tarquini... bouleversant...

Une fin choc inattendue, des questions en suspens, des personnages qui gardent leur mystère.... je n'ai qu'une hâte, c'est poursuivre la lecture de cette série particulièrement bien nommée "Chroniques merveilleuses"

Un grand merci à l'auteur pour sa confiance et sa compréhension et pour cette si chouette découverte ! 

Mon appréciation : 📚📚📚📚

 

mercredi 28 octobre 2020

Impact







Auteur : Olivier Norek
Editions : Michel Lafon








Face au mal qui se propage
et qui a tué sa fille

Pour les millions de victimes passées
et les millions de victimes à venir

Virgil Solal entre en guerre,
seul, contre des géants.
Paru le 22 octobre 2020

Mon avis :

Parce que j'ai aimé TOUS les livres de Olivier Norek à divers degrés (avec de beaux coups de cœur ...), lorsque ce nouveau roman a été annoncé je l'ai immédiatement précommandé, reçu son jour de sortie et lu dans la foulée avec grand enthousiasme.... 

Sur le papier tout était là pour me plaire, et d'ailleurs j'ai beaucoup aimé le début, les quelques premiers chapitres où l'intrigue est posée, les personnages présentés. Virgil Solal un héros solitaire, solide, son histoire personnelle, les constats troublants, l'enlèvement, la mise en scène, les morts, les enquêteurs très attachants avec leurs singularités, tout commençait fort bien mais très vite, l'intrigue s'est enlisée dans un manifeste écologique à charge. J'ai certes découvert nombres d'exaction, d'affaires perturbantes, je salue les convictions de l'auteur, son travail de recherche comme l'attestent les nombreuses références en fin d'ouvrage, je comprends son intention mais ce n'est pas ce que j'attendais de ma lecture. Le côté polar fait pale figure face aux développements idéologiques, au catalogue alarmiste (certainement à raison, je ne remets nullement en cause le fond). 

Une lecture décevante, loin de mes attentes mais je suis sûre que ce livre trouvera ses lecteurs plus sensibles que moi à la forme et au propos, à la base je ne lis pas les documents, essais, biographies, ce qui explique cela.

Je vais cependant attendre le prochain Olivier Norek dont je reste une inconditionnelle, pour retrouver son écriture, sa si profonde humanité...


Mon appréciation : 📚📚



 

jeudi 22 octobre 2020

Le bruit des avions

 





Auteur : Sophie Reungeot

Editions : HarperCollins







Vendredi 13 – Paris 11e. Audrey s’engouffre dans le premier taxi venu et prend place sur le siège passager. À l’arrière, il y a Laura, qui n’avait pas prévu de débarquer avec une inconnue chez sa mère, au 18e étage d’une tour au sud de la capitale. 
Ce qui était prévu et ce qui ne l’était pas, c’est tout l’enjeu de cette nuit particulière et de celles qui viendront. Car les heures blanches qui suivent l’attaque au Bataclan agissent comme un révélateur pour ces deux jeunes femmes si diamétralement opposées, qui prennent la mesure de ce qu’étaient jusqu’alors leurs vies. Des vies écrites sur des rêves qui n'étaient pas toujours les leurs et dont il ne reste qu’une empreinte, des costumes endossés malgré les coutures qui craquent, des énigmes familiales jamais percées auxquelles il faut s’atteler. Parce que le temps presse.
Une histoire de providence ? Une amitié comme un coup de foudre pour commencer. Et la route que vont prendre Laura et Audrey au son de vieilles cassettes poussées au maximum. De Paris à Las Vegas en passant par Berlin et Prague, voilà l’itinéraire de deux filles, reliées comme deux sœurs, cœurs siamois bien décidés à profiter de leur liberté, déterminés à s’emparer complètement de leur existence.
Paru le 7 octobre 2020

Mon avis

Lorsque Babelio m'a proposé ce roman pour une masse critique privilégiée, j'ai trouvé le résumé intéressant et je n'ai pas mis longtemps à accepter et pourtant... 
Je ne vais pas tourner autour du pot, je suis passée complètement à côté de ce livre....

Tout d'abord l'histoire ne m'a pas embarquée, j'ai eu beaucoup de mal avec l'univers du poker qui ne me passionne absolument pas et j'ai trouvé que la rencontre, les relations entre les filles, tout est resté extrêmement superficiel. Il m'a manqué en outre une dimension plus profonde de l'après Bataclan, j'attendais une vraie réflexion sur le traumatisme et je ne l'ai pas trouvée.
Pas d'empathie pour les personnages et l'histoire de Christine et Betty vient parasiter très vite le récit principal et même prendre le pas sur lui. Les coïncidences et les raccourcis faciles ne m'ont pas convaincue...

Et ensuite, il y a la plume et là ça ne l'a pas fait non plus.... un style plutôt simple proche du langage oral qui parfois devient très familier, voire trop pour moi. En soi, ça aurait pu être un parti pris du roman  mais comme ce n'est que par moment c'est venu casser mon rythme de lecture ...
Honnêtement, je ne sais pas si c'est parce que j'ai lu des épreuves non corrigées et que tout cela a disparu dans la version définitive, mais personnellement ces variations de style m'ont profondément gênée !

Bref, un rendez-vous manqué.... 

Mon appréciation📚



mercredi 14 octobre 2020

La chute de la maison Whyte

 






Auteur : Katerina Autet
Editions : Robert Laffont
Collection : La Bête Noire






Les secrets de famille tuent plus sûrement qu'une arme.

Cape Cod, ses belles villas aux bardages de bois, ses millionnaires discrets qui par-dessus tout ont peur du scandale... Mais, justement, le scandale fait vendre. Bien qu'elle s'en défende, c'est ce qu'Edith Whyte a en tête lorsqu'elle publie un livre accusant son célèbre père, grand patron des arts, de crimes inimaginables.
Père et fille n'ont pas le temps de s'expliquer : William Whyte est retrouvé assassiné et le frère d'Edith est accusé du meurtre.
Tandis que la famille se déchire, la bonne société bruit des rumeurs les plus folles...
Paru le 17 septembre 2020

Mon avis :

Dans la famille Whyte il y d'abord William, le patriarche qui a eu ses enfants sur le tard. Il est à la tête d'une véritable fortune amassée dans les affaires et le monde des arts. Ensuite il y a Edith la fille rebelle, puis Skip le fils insouciant et enfin la petite dernière la ravissante Caroline. 
Une famille unie ? Pas si sûr ! Un livre est publié écrit par l'aînée, un livre explosif à charge contre le père, révélant de sombres secrets... Impossible de l'ignorer, il fait la une des médias.

Lorsque le père est assassiné, tous les soupçons se portent sur Skip, tout l'accable... Anéanti, il fait appel à son ami Zach Damon, avocat, même si sa spécialité n'est pas le crime mais le droit des arts...  Comment prouver l'innocence de Skip si ce n'est en trouvant le véritable coupable. Commence alors l'enquête : quel est le mobile : la publication du livre, l'argent ou ce mystérieux tableau glissé entre les mains du défunt ? 

La narration intime et la construction du récit intelligemment organisée donnent un ton authentique au roman 
Le récit se fait à la première personne et c'est Zach l'avocat du prévenu qui raconte. Mais son rôle est particulier puisqu'il a un intérêt personnel dans cette affaire, il entretient un fort lien affectif avec la famille entière. Sa place est peu confortable mais il ne sait pas refuser et tente de démêler le vrai du faux . 

Les chapitres alternent entre enquête et extraits du livre d'Edith.
Deux points de vue bien distincts, en premier lieu la voix de Zach qui nous accompagne tout au long du roman pour nous faire découvrir les non-dits, la face réelle de la famille, point de vue chargé de sentiments, d'émotion.. , puis le livre à charge, plus direct et mordant, qui soulève nombre de questions. On remonte dans le temps, les souvenirs personnels de Zach et l'histoire de la famille Whyte s'entremêlent, se confrontent. Des secrets sont mis à jour... 
Quel mélange réussi !

L'atout principal du roman est cette enquête à la fois professionnelle et personnelle. Pas de neutralité possible et tout affecte Zach... Il est ballotté entre découvertes et soupçons, et par ailleurs doit gérer ses propres problèmes personnels de couple. C'est un personnage en pleine tourmente qui suscite une vraie empathie. 

Les chapitres courts, l'alternance des points de vue, le durée resserrée du récit (tout se passe entre le 17 et le 30 octobre), la voix et les émotions de Zach, la très belle plume nous emportent sans temps mort jusqu'à la fin où la vérité est mise à jour. 
Les investigations sont terminées mais dans la vie de Zach rien n'est vraiment dénoué... je le retrouverais bien volontiers dans une nouvelle enquête !   

Un roman qui se dévore quasi d'une traite, une excellente lecture ! 
Vivement le prochain grand prix des enquêteurs ! 

Un grand merci à Robert Laffont et La collection  La Bête Noire 

Mon appréciation📚📚📚📚 






dimanche 11 octobre 2020

De sang et d'encre

 






Auteur : Rachel Kadish
Editions : Cherche Midi




2017, Londres. Professeur d'université proche de la retraite, Helen Watt est contactée par un ancien élève afin de venir étudier des documents en hébreu récemment découverts dans une maison du XVIIe siècle. Très vite, elle est intriguée par l'auteur de ces manuscrits, un certain " Aleph ", dont elle va vouloir déterminer l'identité.

1660, Amsterdam. Ester Velasquez est une femme d'une intelligence et d'une culture exceptionnelles. Secrétaire bien-aimée d'un rabbin aveugle fuyant l'Inquisition espagnole, elle le suit à travers l'Europe et jusqu'à Londres, au moment où la ville est touchée par la peste.
Paru le 17 septembre 2020

Mon avis :

Tout d'abord je tiens à remercier  Léa  et le Picabo River Book Club ainsi que les Editions Cherche Midi  pour ce nouveau partenariat. 

Une superbe lecture profonde et passionnante sur l'Histoire, la place de la femme, la religion, la philosophie....et qui jongle entre deux époques 2017 et 1660.

2017, Londres, Helen Watt, professeur émérite spécialiste de l'histoire juive est appelée pour examiner des vieux papiers dissimulés dans une maison du XVIIe siècle. C'est une très belle découverte et elle s'attelle avec passion à décrypter ces documents avec l'aide d'un jeune étudiant Aaron Lévy. Il s'agit de lettres et autres papiers ayant appartenu à un rabbin, HaCoen Mendes. Le nom du copiste Aleph attire très vite leur attention....

1660, le rabbin HaCoen Mendes torturé par l'Inquisition en Espagne a trouvé refuge en Angleterre. Mais désormais aveugle, il a besoin d'aide pour écrire et pour correspondre avec ses pairs à travers le monde. Il vit avec deux jeunes orphelins qu'il a recueillis Ester et Isaac Vélasquez et sa servante Rivka. Isaac fuit son passé et  se perd dans les rues de Londres... C'est donc Ester, jeune femme cultivée qui prend sa place auprès du vieil homme.... 

L'alternance chapitre par chapitre s'organise entre les deux époques et j'ai autant aimé l'une que l'autre, ce qui est rare. Deux époques, deux histoires passionnantes !

Il y a l'histoire d'Ester qui doit faire preuve de tant d'astuce pour parvenir à exister dans un siècle qui lui refuse son libre arbitre. Elle est emportée par l'Histoire : l'Inquisition, la peste... 
Mais il y a aussi l'histoire d'Helen, hantée par ses souvenirs d'Israël, qui lutte contre la maladie et qui souhaite aller au bout de ses découvertes avant de partir à la retraite.
Deux magnifiques portraits de femmes intelligentes, fortes. Leur passé, leurs blessures apparaissent peu à peu et c'est à travers ces quelques papiers que l'Histoire les rapproche.

Outre ces deux héroïnes, Aaron apporte une autre dimension au roman avec ses propres questionnements, sa réflexion sur les choix de vie. D'autres figures marquantes traversent le récit : le rabbin, la servante Rivka, Dror, Manuel et Alvaro HaLevy....

Il serait dommage d'en raconter trop, il y a tant à découvrir dans ce livre ! C'est le parcours d'Ester et d'Helen, mais aussi l'histoire des juifs et de l'antisémitisme à travers le temps, l'exil forcé, on y parle de Shakespeare, de Spinoza, c'est une belle réflexion sur la religion et sur la place des femmes.

La plume est superbe, j'ai adoré la narration, cette façon sensible d'entrer dans l'intimité des personnages, leur introspection, de raconter les relations qu'ils entretiennent. Elle crée avec beaucoup d'élégance des ambiances particulières : la dimension un peu sacralisée de la recherche dans l'atmosphère feutrée des bibliothèques ; elle entretient un suspense croissant entre la vie amoureuse d'Aaron,  le destin incertain d'Ester, la réussite d'Helen compromise par une concurrence féroce entre équipes de chercheurs. 

La fin du roman est une véritable course contre la montre pour enfin percer tous les secrets enfouis dans les documents. Magnifique dénouement plein d'émotion !

Une excellente lecture que je ne peux que vous conseiller vivement.


Mon appréciation📚📚📚📚

lundi 28 septembre 2020

Amitié, tout ce qui nous lie




Auteur : Heike Faller
Illustrateur : Valerio Vidali
Editions : Du seuil et du Sous-sol




Ce livre est dédié à toutes les amitiés : les éphémères, celles qui durent toute une vie, celles qui sont devenues des histoires d'amour et celles que nous n'avons pas osé sauver.
A paraître le 1er octobre 2020


Mon avis

Lorsque j'ai reçu le mail de Babelio me proposant cet album pour une masse critique privilégiée, je n'ai pas hésité une seconde. Le thème et la couverture m'ont de suite interpelée et je ne le regrette pas.

En 180 pages sont abordées toutes les facettes possibles des amitiés, celles qui viennent de l'enfance, les amitiés amoureuses, les amitiés conflictuelles.... Avec peu de mots, le texte est vraiment minimaliste, l'auteur parvient à créer une vraie connivence avec le lecteur, on se retrouve inévitablement à un moment dans ces petits bouts d'histoire, de vie.....ceci renforcé par le tutoiement utilisé et la narration à la première personne.

Les dessins très colorés servent à merveille le propos, j'ai beaucoup aimé le crayonné effet craie qui donne un grain particulier, quelque chose qui rappelle à la fois la douceur mais aussi les aspérités d'une vie. Les personnages un peu stylisés aux visages neutres sans expression (il n'y a aucun œil, aucune bouche de dessiner) laisse toute imagination et appropriation des situations au lecteur. 

Il y a les mots chargés d'émotion et de délicatesse et les dessins chargés de poésie (zoom sur des objets symboliques, utilisation de l'espace feuille tantôt réduite tantôt ample), le tout donne une album très réussi que l'on feuillette à l'envi. 

Quelques pages en toute fin raconte "L'idée de ce livre..." une jolie postface pour clôturer un bel album.


Mon appréciation : 📚📚📚📚


jeudi 17 septembre 2020

Là où se trouve le cœur





Auteur : Sara Lövestam
Editions : Robert Laffont
Collection : La Bête Noire





Une chambre en colocation, un permis de résidence et un job dans une bibliothèque : les années de galère de Kouplan sont définitivement derrière lui ! Toutefois, il y a une chose qu'il ne parvient pas à se sortir de la tête : qu'est-il arrivé à son frère, arrêté en Iran il y a huit ans ? En se lançant à sa recherche, il croise la route de neuf immigrés illégaux qui, comme lui auparavant, font la plonge ou le ménage pour quelques couronnes de l'heure. L'un des leurs est mort, mais personne ne peut dénoncer les coupables à la police, de peur d'être expulsé...
Kouplan va alors devoir faire face à ses anciens démons pour aider ceux qui n'ont personne vers qui se tourner.
Paru le 2 juillet 2020

Mon avis :

Superbe lecture encore une fois ! J'aime beaucoup cette série pleine d'humanité... Ce tome 4 a été impossible à lâcher, émotions, suspense et moments d'extrême tension...

Kouplan est enfin en possession de son précieux permis de séjour. En colocation avec Lennon et Ulrik, il s'est trouvé un stage en bibliothèque.  Il peut désormais reconstruire sa vie en toute tranquillité. Mais pourtant il reste un vide qui l'empêche de profiter pleinement de sa nouvelle condition. Sa famille lui manque et il ne peut cesser de rechercher son frère Nimia dont il n'a aucune nouvelle depuis sa disparition en Iran. 
Ses investigations l'amènent vers son ancien logis où cohabitent 9 réfugiés sans papiers qui subissent les mauvais traitements de ses anciens employeurs. Il est question de meurtre et pour Kouplan, lui qui s'en est sorti, il est impossible de ne pas se sentir concerné. Toujours aussi empathique, il ne peut s'empêcher de s'impliquer pour tenter de les aider. 

S'en suit une enquête assez incroyable où chacun est mis à contribution pour tenter de démasquer les criminels tout en essayant d'éviter d'en subir les conséquences. Mais le danger est grand .... et chacun va risquer sa vie en suivant les plans de Kouplan. 

Outre cette enquête très particulière et passionnante, c'est le destin tragique des sans-papiers qui encore une fois est évoqué entre désespoir et résignation. Le trafic très lucratif dont ils font l'objet est largement dénoncé. 

En parallèle, Kouplan continue ses recherches personnelles et va croiser Victor qui tremble tous les jours pour sa sécurité et celle de sa famille. Il est pourchassé par un homme qui semble tout connaître de son passé et menace son équilibre encore précaire. Cette rencontre est particulièrement touchante. Certainement, le point d'orgue du roman.

L'auteur brosse une galerie de personnages avec beaucoup d'humanité, des marginaux, des laissés pour compte, des adeptes du parkour. 
Il aborde aussi très largement avec justesse et émotion la question de l'identité sexuelle, un sujet essentiel pour notre héros, de son impact sur les familles. 

Une belle réussite, un roman captivant qui alterne entre enquête, témoignage social et introspection personnelle.  La fin offre une jolie touche d'optimisme ! 

Un grand merci à Robert Laffont et La collection  La Bête Noire 

Mon appréciation📚📚📚📚

samedi 12 septembre 2020

Les enquêtes d'Enola Holmes - tome 1 : La double disparition

 






Auteur : Nancy Springer
Editions : Nathan






Ceux qui disent que Sherlock Holmes est le meilleur détective ignorent encore l'existence de sa jeune sœur de quatorze ans... 
Ma mère m'a appelée Enola, qui, à l'envers, se lit alone, "seule" en anglais. Et lorsque Mère disparaît, le matin de mon quatorzième anniversaire, c'est bien seule que je me suis retrouvée. Appelés à l'aide, mes frères Mycroft et Sherlock Holmes - oui le célèbre détective - n'avaient en fait qu'une idée en tête : m'envoyer en pension pour faire de moi une lady. Mais, me refusant à accepter ce sort, je décidai plutôt de prendre mon destin en main et de me lancer, seule, à la recherche de ma mère.
Paru le 4 juin 2009

Mon avis :

Voilà un bon moment déjà que j'avais envie de découvrir cette série jeunesse et la sortie du film sur Netflix m'a poussée à sortir le tome 1. Une chouette lecture qui a rempli toutes mes attentes.

Enola Holmes est la jeune sœur de Mycroft et Sherlock mais il y a fort longtemps que ces derniers ne sont pas venus les voir elle et sa mère. Toutes deux se sont organisé une vie bien à elles. Enola a grandi auprès d'une mère distante et peu conventionnelle qui lui a appris l'indépendance mais aussi la solitude. 

Lorsque au matin de son quatorzième anniversaire Enola s'aperçoit de la disparition de sa mère, elle fait appel à ses frères. Mais ceux-ci ne comprennent pas ses aspirations, sa personnalité et elle se retrouve plus seule que jamais....  Menacée de pensionnat pour dompter son caractère, elle prend la fuite et tente de retrouver sa mère.

S'en suit une aventure de tous les instants, découverte du monde, rencontre d'un jeune lord en fuite, danger de mort, déguisements, messages codés (une jolie trouvaille fort bien amenée et exploitée), réflexion et déduction, enquête parallèle, on ne s'ennuie jamais en suivant la jeune Holmes pleine de ressources qui s'affirme au fur et à mesure des pages. Et si Sherlock ne fait que de brèves apparitions, Enola prend la relève avec brio, c'est une jolie héroïne fort attachante, perspicace que rien n'arrête, elle se sort de toutes les situations avec intelligence, bravoure et la narration à la première personne permet au lecteur de suivre au plus près ses sentiments, ses hésitations, ses raisonnements...

Outre le récit des aventures de notre jeune détective, tout un pan de l'histoire s'attache à la condition féminine de l'époque, sur leurs droits restreints. Le caractère indépendant de la mère a permis à Enola de bénéficier d'une instruction peu habituelle pour une jeune fille et avec son caractère rebelle, celle-ci jette un regard sarcastique sur les vêtements contraignants qu'on tente de lui imposer, sur le rôle qu'on veut lui faire jouer.

Une lecture jeunesse pleine de charme que l'on dévore d'une traite. Le tome 2 est d'ores et déjà commandé !  

Mon appréciation📚📚📚📚



Le film en bref
J'ai adoré ! Les images sont superbes, l'ambiance victorienne parfaitement rendue et les acteurs sont formidables.  J'ai beaucoup aimé la connivence entre Enola et Sherlock bien plus marquée que dans le livre.



mardi 8 septembre 2020

L'essence des ténèbres

 






Auteur : Tom Clearlake
Editions : Moonlight





La petite ville de St. Marys est frappée par des disparitions d'enfants inexpliquées. Cinq au total, en l’espace de quatre mois. Bien qu’aucun indice formel n’ait été relevé par les forces de police, tout porte à croire qu’il s’agit d’enlèvements. Le FBI est chargé du dossier.L'agent spécial Eliott Cooper est envoyé sur place pour enquêter. Peu à peu, il va être confronté à des faits qui ne relèveront plus de ses compétences d'agent, mais de sa capacité à lutter contre un mal obscur qui semble s’être emparé des forêts alentour de la ville... et ça n'est que le début de son enquête.
Paru le 30 avril 2018

Mon avis

Voilà un genre que j'ai peu eu l'occasion de lire, je me suis surtout laissée tenter par le résumé très accrocheur et j'avoue que j'ai pris plaisir à suivre les aventures extra-ordinaires de  l'agent Eliott Cooper.

Des disparitions d'enfants à répétition dans une petite ville jusqu'alors tranquille et c'est l'agent Eliott Cooper qui est envoyé sur place pour tenter de découvrir ce qu'il est leur est advenu.  Eliott Cooper n'est pas un simple agent du FBI, c'est un flic d'élite aux origines amérindiennes, surentraîné, qui connait parfaitement son travail, un homme charismatique, taiseux. 

Lorsqu'il arrive à St Marys, il s'enfonce dans la forêt environnante pour installer son campement. Très vite, il est frappé par l'ambiance particulière qui s'en dégage..... pas un bruit, aucun mouvement, froissement, cri d'oiseau.... Surpris, mal à l'aise, il va entamer ses investigations qui vont l'amener à découvrir des choses incroyables....  Le fantastique s'invite dans l'histoire, ce qui se passe dans ce coin isolé va impacter le monde entier. Très vite, Eliott est dépassé par les événements et se retrouver dans la peau d'un fugitif recherché par toutes les polices. Il aura besoin de l'aide de l'agent Lauren Chambers, pour se sortir des graves périls qui le menacent et pour aller au bout de cette enquête à nulle autre pareille.

Il y a plusieurs points forts dans ce roman. Tout d'abord la figure d'Eliott, ce flic surdoué confronté à quelque chose qui le dépasse et contre laquelle il va se battre corps et âme avec l'aide de la femme de sa vie. Ensuite il y a cette atmosphère pleine de tension qui suscite l'angoisse.  Et pour finir, il y a cette histoire à la dimension visuelle essentielle qui révèle un vrai potentiel cinématographique. 

Très bien construit, le récit entraîne le lecteur dans le temps et dans l'espace pour mettre à jour une théorie prenante. Si tout n'est pas toujours crédible, on accepte de passer outre sans problème et surtout on ne s'ennuie pas , le rythme est parfois intense : enquête, poursuites, morts sanglantes, révélations,  et une course contre la montre qui s'affole dans les derniers chapitres.... jusqu'à la fin plutôt bien pensée.

Mais je n'en dirai pas plus, l'effet de surprise doit rester entier !

Je remercie l'auteur pour sa confiance.

Mon appréciation : 📚📚📚

lundi 31 août 2020

Ohio




Auteur : Stephen Markley
Editions : Albin Michel




Par un fébrile soir d'été, quatre anciens camarades de lycée désormais trentenaires se trouvent par hasard réunis à New Canaan, la petite ville de l'Ohio où ils ont grandi.
Bill Ashcraft, ancien activiste humanitaire devenu toxicomane, doit y livrer un mystérieux paquet. Stacey Moore a accepté de rencontrer la mère de son ex-petite amie disparue et veut en profiter pour régler ses comptes avec son frère, qui n'a jamais accepté son homosexualité. Dan Eaton s'apprête à retrouver son amour de jeunesse, mais le jeune vétéran, qui a perdu un œil en Irak, peine à se raccrocher à la vie. Tina Ross, elle, a décidé de se venger d'un garçon qui n'a jamais cessé de hanter son esprit.
Tous incarnent cette jeunesse meurtrie et désabusée qui, depuis le drame du 11-Septembre, n'a connu que la guerre, la récession, la montée du populisme et l'échec du rêve américain. Chacun d'entre eux est déterminé à atteindre le but qu'il s'est fixé.
À la manière d'un roman noir, cette fresque sociale et politique hyperréaliste s'impose comme le grand livre de l'Amérique déboussolée et marque l'entrée en littérature d'un jeune écrivain aussi talentueux qu'ambitieux.
Paru le 19 août 2020

Mon avis

Une de mes meilleures lectures de cette année, un livre percutant, bouleversant.... une vraie réussite et un grand coup de cœur.
Quelle sensibilité, quelle intelligence dans la construction du récit.... je n'ai rien vu venir...

Prologue : Enterrement de Rick Brinklan tombé au chant d'honneur, sa famille, ses amis sont là pour l'accompagner une dernière fois.... mais pas tous.... il y a des absents que l'on remarque, des amis de jeunesse.

Ellipse de temps : 6 ans plus tard, dans la petite ville de New Canaan, Bill Ashcraft, Stacey Moore, Dan Eaton et Tina Ross se croisent à nouveau dans les rues de leur adolescence. Chacun est là pour une raison bien précise. Et c'est l'occasion de plonger dans les souvenirs ...

Quatre parties, quatre points de vue, une narration non linéaire mais plutôt un patchwork de moments clés qui alternent entre passé et présent. C'est remarquablement construit.
L'histoire se réécrit page après page, rencontre après rencontre, souvenir après souvenir : Une bande de jeunes insouciants, en plein devenir : Bill, Rick, Dan, Ben, Lisa, Stacey, Haley, Todd, Tina...etc..... Les relations sont amicales, complices, conflictuelles. Une hiérarchie est présente implicitement avec le culte du sport et la place particulière donnée à ceux qui le pratiquent. L'auteur dépeint avec grande justesse les relations qui se nouent et se dénouent...Et les points de vue intimes puis extérieurs donnent une épaisseur à chaque protagoniste.  C'est l'âge de toutes les expériences, l'alcool, le sexe, la drogue... et de tous les excès. L'arrogance de la jeunesse s'exprime devant tous les possibles qui s'offrent à elle.

Tous ces jeunes en devenir sont frappés de plein fouet par le 11 septembre. Dans un pays traumatisé, il faut choisir son camp, les clivages apparaissent, prennent de l'importance et  la guerre laissera des blessures tant morales que physiques. L'auteur dessine leurs trajets de vie, leurs rêves au moment de tous les possibles, puis les choix faits, les événements, les rencontres qui les ont infléchis. C'est un bilan sans concession sur le rêve américain désagrégé qui se dessine à travers les pages

Une foule de thèmes sont abordés, société, politique, religion, sexualité, drogue, famille, amitié, écologie, guerre, de façon saisissante, et chaque événement est évoqué avant tout pour l'impact dans la vie de chacun, ce qui leur donne une dimension sociale plutôt qu'historique et j'ai adoré ça.

L'auteur décrit avec acuité les paysages et l'environnement, sont notés toutes les traces de la société de consommation et les ravages de la crise, du rêve américain qui se délite, .
S'y ajoutent des références culturelles constantes : livres, musiques, films etc... qui enrichissent le récit et l'implante dans son temps.

L'histoire est passionnante de bout en bout, les personnages très réalistes et sans aucun manichéisme. Tout le monde est capable de tout, même le meilleur d'entre eux... s'en suit les remords, les regrets, la culpabilité et une vie que l'on subit. On découvre pas à pas cette histoire où tous les destins sont enchevêtrés, chacun cherche ses réponses et c'est le temps des révélations, des surprises auxquelles je ne m'attendais absolument pas, certaines d'une violence incroyable...

Ce roman est un véritable bijou, construit avec intelligence, écrit avec beaucoup de sensibilité et de justesse, sans aucune concession, une écriture vivante  pour décrire une génération ayant perdue ses repères dans un monde en profonde évolution.

Je ne pourrai certainement pas oublier en particulier l'histoire de Dan qui m'a tellement touchée....

 

Un grand merci au  Picabo River Book Club. et à Léa 
ainsi qu'aux Editions Albin Michel pour cette magnifique lecture ! 


Mon appréciation