Auteur : Flore Vesco
Editions : L'école des Loisirs
Moyen Age. Les rats ont envahi la paisible bourgade d'Hamelin. Vous croyez connaître cette histoire par cœur ? Vous savez qu'un joueur de flûte va arriver, noyer les rats en musique, puis les enfants d'Hamelin ? Oubliez ces sornettes : la véritable histoire est bien pire, et c'est grâce à Mirella, une jeune fille de 15 ans, qu'on l'a enfin compris. Jusqu'ici, elle passait inaperçue en ville qui s'intéresserait à une porteuse d'eau, à une crève-la-faim, une enfant trouvée ? Seulement voilà, Mirella a un don ignoré de tous : elle voit ce que personne d'autre ne voit. Par exemple, elle a bien repéré ce beau jeune homme en noir, qui murmure à l'oreille de ceux qui vont mourir de la peste... Et ça lui donne une sacrée longueur d'avance. Y compris sur le plus célèbre dératiseur de tous les temps.
Paru le 17 avril 2019
Mon avis :
Comme chaque année #BBenlivre (Booktube et la Blogo en livre) a débuté en juillet, j'aime infiniment cet événement qui met en lumière la littérature jeunesse. Chaque jour, des articles ou vidéos sont publiés pour rendre hommage à un auteur jeunesse, un thème, un titre ou une série et un super concours est organisé.
Cette année je me suis inscrite au off pour ajouter ma petite pierre à l'édifice 😊
Pourquoi ai-je décidé de participer ? Je lis tout un tas de livres dans des genres divers et variés et j'aime revenir très régulièrement vers la lecture jeunesse dans laquelle j'ai trouvé nombre de pépites. Aujourd'hui, je vais vous présenter 'une de ces pépites dont on ne parle pas assez à mon sens.
Revisiter un conte est un art difficile. Bien des auteurs s'y sont essayé avec plus ou moins de réussite et Flore Vesco en s'attaquant au Joueur de flûte de Hamelin a relevé le gant avec succès !
En reprenant la trame du récit originel (dont le résumé est très judicieusement glissé en prologue), elle en a gardé l'âme tout en y apportant une vraie modernité et une inventivité folle.
Les éléments sont tous là : le village au Moyen Age, l'invasion des rats, le bourgmestre, les enfants, le joueur de flûte, un peu de magie.... mais l'auteur a choisi de mettre au centre de la narration Mirella jeune fille astucieuse, joyeuse et pleine d'entrain toujours prête à aider autrui et à chantonner. Quelques personnages supplémentaires viennent étoffer l'histoire, le jeune Pan qu'elle prendra sous son aile, le mystérieux Peest... etc.... et le conte prend une toute autre densité. Un tas d'aventures passionnantes vont arriver à tout ce petit monde, aventures teintées de fantastique parfois dont je me garderai bien de révéler la teneur, ce serait bien dommage de trop en dire !
Outre la trame ingénieuse de l'histoire parfaitement maîtrisée qui oscille entre noirceur (les rats, la peste...) et allégresse (la musique, le chant...), il y a tout un univers qui est dépeint d'une plume vivante. Le lecteur est totalement immergé dans le Moyen âge dont toute l'imagerie est présente : la misère, les conditions de vie insalubre, les mendiants, les lépreux, la religion, la médecine, la justice expéditive et les exécutions publiques... mais tout cela présenté avec une légèreté incroyable, un humour subtil et un ton parfois un brin sarcastique. S'y ajoute un travail particulièrement soigné sur l'écriture, Flore Vesco utilise un langage ciselé flirtant avec l'ancien français tout en restant parfaitement compréhensible. Elle manie avec grand art les jeux de mots. C'est vivant, c'est imagé, c'est intelligent, drôle....
Et de l'humour, il y en a à foison !
Je ne résiste pas au plaisir de vous mettre une courte citation pour vous en donner un petit aperçu :
"Sous l’instruction de son bourgmestre,
Hamelin était devenue une ville de grande modernité.
Un exemple. Partout ailleurs dans le Saint Empire germanique, les citadins jetaient leurs eaux usées dans la rue, en criant :
« À la mouscaille ! » Aussi n’était-il pas possible de sortir de chez
soi sans recevoir au moins une fois sur la tête le contenu malodorant d’un pot de chambre.
Alors qu’à Hamelin, une fois par an, lors d’une grande
messe, le prêtre bénissait les caniveaux de la ville, les pots de
chambre et les intestins de ses paroissiens. Par conséquent, les
badauds qui se trouvaient compissés ou souillés par des ordures
jetées depuis les fenestrous, recevaient en fait une onction sacrée
qui participait au salut de leur âme." (page 13)
Tout en jouant ainsi avec le conte en le distordant, avec les mots en les ajustant, l'auteur glisse des thèmes importants dans son récit comme l'organisation de la société et la justice sociale, la place des femmes, la toute puissance de la religion.... le récit s'ancre entre passé et modernisme.
J'ajouterai pour finir un petit mot sur le travail éditorial de L'école des loisirs, un très joli travail qui sert à merveille le texte : une jolie couverture à rabat avec quelques brillances qui rappellent les enluminures, des lettrines en début de chaque chapitre et des petites flûte entre certains paragraphes. C'est du bel ouvrage !
Cette lecture a été un vrai coup de cœur. J'avais déjà beaucoup aimé De cape et de mots, mais celui-ci encore plus, non seulement j'ai retrouvé mon âme d'enfant dans le plaisir du conte, un conte ingénieusement étoffé, mais j'en ai savouré chaque ligne tant j'en ai aimé la plume, la verve, la truculence, l'humour, l'inventivité...
Je suis définitivement fan de Flore Vesco qui, à mon sens, est un des meilleurs auteurs jeunesse français et je ne peux que vous inviter à la lire !
Mon appréciation :
Demain, BBenlivre continue et ce sera le tour de Coffee and books de vous offrir une vidéo sur sa chaîne.
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